11 novembre 2018 : discours d' Émile Roger Lombertie
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Monsieur le Préfet,
Madame la Députée,
Madame la Sénatrice,
Monsieur le Sénateur,
Monsieur le Vice-président, représentant le président du Conseil régional,
Monsieur le Président du Conseil départemental,
Madame la rectrice d'académie,
Mon Général, commandant adjoint de la région de gendarmerie Nouvelle-Aquitaine,
Monsieur le Délégué militaire départemental,
Monsieur le Directeur départemental de la sécurité publique de la Haute-Vienne,
Mesdames et Messieurs les élus régionaux,
Mesdames et Messieurs les élus départementaux,
Mesdames et Messieurs les élus municipaux,
Mesdames et Messieurs les représentants de la justice,
Messieurs les présidents des chambres consulaires,
Mesdames et Messieurs les représentants et membres de l’Association nationale des anciens combattants et de la Résistance,
Mesdames et Messieurs les membres du Comité de coordination des associations de la résistance et de la déportation,
Messieurs les représentants des cultes,
Chères limougeaudes et limougeauds,
Mesdames et Messieurs,
Dans quelques minutes, les cloches de la ville, du département, du pays retentiront. Elles nous annonceront la fin de la grande guerre. Leur timbre résonnera dans le cœur de chaque français, en imprimant dans leur mémoire, le son inoubliable, de la paix recouvrée. C’est le son qu’ont entendu nos aïeux, il y a 100 ans, un siècle : à la onzième heure du onzième jour du onzième mois, l’armistice était signé.
Ce n’est pas une page qui se tourne, alors, mais un livre qui s’ouvre avec de nombreux chapitres, dont celui du souvenir. Aujourd’hui Ami, souviens-toi !
Souviens-toi, mais pas seulement. Aujourd’hui, regarde plus précisément, écoute plus attentivement, ressent plus intensément. Car c’est à toi, Ami, de donner à notre monument aux morts, tout le sens qu’il n’avait jamais eu. Aujourd’hui l’éloge de la paix voulu en 1932, s’enracine dans le jardin des souvenirs et de la reconnaissance à tous ceux, de Limoges, qui sont morts pour elle. Point de déni, point d’opposition, mais la simple acceptation de notre humanité et de ses limites et contraintes. L’anthropologie, l’ethnologie, l’histoire nous rappellent que l’homme est grégaire, qu’il vit sur un territoire avec lequel il fait corps. Ce territoire fait partie de son identité, s’intègre à sa culture et en devient une part importante. De tous temps les groupes humains se sont liés pour défendre l’un et l’autre. Sans armée pour défendre l’espace commun point d’état de droit, point de libertés, point de relations stables avec les autres états. Deux présidents Français, dans l’histoire récente, l’avaient particulièrement compris, eux qui avaient vécu les deux grandes guerres du 20ème siècle : Charles de Gaulle et François Mitterand. Regardons autour de nous, sur notre planète, partout des guerres et des affrontements. Regardons nous, ici, aujourd’hui : avons nous conscience d’être dans un pays en guerre contre le terrorisme ?
Ils se prénommaient Jean, Martial, Antoine, Pierre, André, Baptiste, René, Adrien … Avec leurs frères d’armes, ils partirent en ce mois d’août 1914, joyeux, pour reprendre l’Alsace et la Lorraine. Dans leurs rangs nombreux étaient ceux qui croyaient que la rencontre avec leurs frères allemands se terminerait par une alliance pacifique. La violence de l’attaque ne leur en laissa pas le temps. J’ai eu la chance, enfant puis adolescent d’écouter et d’entendre leurs récits : la Marne, La somme, Verdun, la côte du poivre, l’Italie et la Piave, les Dardanelles. Que ce soit mes deux grands pères Pierre l’Artilleur, Jean le Corps Franc, mes grands oncles Louis et François le gazé, tous avaient eu de nombreuses distinctions pour fait d’arme et Bravoure. Ils étaient majoritairement paysans et ouvriers et voulaient défendre leur Pays, leur patrie, celle de la République ou ils désiraient vivre libres, égaux en droit et en pleine fraternité. C’est cet idéal, celui issu de Valmy qui leur fit surmonter l’horreur. N’oublions jamais leur abnégation, leurs souffrances, leur courage pour affronter la peur de la mort, leur résilience pour surmonter les visons du terrible quotidien et continuer à espérer.
100 ans, c’est long, c’est loin. Tellement, que l’éloignement chronologique de cette guerre et la disparition de nos derniers « poilus », pouvaient expliquer, sans doute, la banalisation de notre monument, auquel nous ne prêtions que peu d’attention tant il faisait partie de notre cadre quotidien. Alors aujourd’hui, Limoges a décidé, de le faire renaître, de la manière la plus symbolique possible, dans notre champ visuel, dans notre champ affectif, dans notre champ mémoriel. Il doit nous permettre de mesurer la distance qui nous sépare d’un patriotisme sincère qui reposait alors sur le mythe d’une guerre toujours « glorieuse ». Certes, la laideur et la tragédie de la guerre n’a pas été occultée, comme en témoignent les symboles et les scènes exprimant d’abord le deuil et l’infinie tristesse de la mort d’une génération d’hommes jeunes. Mais les symboles veulent aussi donner le sens, du plus noble don, que nos ainés ont pu faire à la patrie : le sacrifice de leur vie. La construction de notre Nation s’est longtemps appuyée sur le mythe de la guerre qui révélait alors les plus hautes vertus civiques : le courage et le don de soi « pro patria ».
C’est aussi le symbole parallèle d’une restitution de la voix d’une génération qui a souffert comme peu d’autres avant elle, et qui nous interroge encore aujourd’hui sur le sens de la vie, sur la conception de la patrie, et sur un avenir qu’elle espérait définitivement débarrassé de l’horreur de la guerre.
Ce nouveau monument ambitionne fièrement, de permettre à chacun et chacune, une relecture d’un langage, qui est peut-être pour certains d’un autre temps, mais qui touche invariablement à notre humanité et à l’examen de notre mémoire nationale. Voilà pourquoi je souhaite donner la couleur et la dimension de la réconciliation à notre monument aux morts.
RECONCILIATION entre la recherche de la vérité et le poids de l’histoire.
RECONCILIATION entre la défense de notre culture, de notre territoire, de notre République qui peut passer par la guerre et l’amour de la paix.
RECONCILIATION entre les quatre champs de la mémoire : celui de la guerre patriotique, celui de la sacralisation de la mort, celui de la régénération de la patrie et enfin celui du pacifisme. Combattre, mourir, renaître et vivre en paix.
RECONCILIATION entre la mémoire d’une ville et l’honneur des familles. 3009 noms sont désormais gravés dans le marbre. Depuis ce matin, leurs noms ont résonnés dans les rues de Limoges. Pour chacun d’entre eux, une voix rappelait qu’ils sont MORTS POUR LA FRANCE. Ecoute ces noms, Ami, ils sont si nombreux qu’ils forment un régiment et tant qu’ils seront dans notre mémoire ils formeront : LE REGIMENT DES IMMORTELS !
Ami, voici donc notre monument portant sur la parure de marbre sa liste tragique, pour rendre hommage aux enfants de Limoges morts pour la France. Certes, nous avons toujours compris combien nous devons à ceux qui moururent pour que nous vivions libres. Mais aujourd’hui, avec ces noms, du séjour des braves, où ils jouissent d’une gloire immortelle et d’une paix éternelle, nos morts contemplent avec satisfaction, nos marques de reconnaissance. Leurs descendants portent aujourd’hui avec fierté cette mémoire et nous les regardons avec respect.
Il est quelque fois des esprits égarés qui proclament qu’il faut pour éviter le retour d’un tel fléau, jeter l’oubli sur toutes les victimes des grandes tourmentes. Je ne suis pas de ceux-là, bien au contraire. Le médecin que je suis sait parfaitement qu’on ne peut vaincre une maladie sans en connaitre toutes ses conséquences. Bien sûr, il faut détester la guerre de toute notre âme, mais nous devons aimer ceux qui l’on faite pour nous offrir la Paix.
Et si nous n’avions pas gravé leurs noms :
Que devraient-ils penser, Eux, qui acceptèrent dans un magnifique renoncement la souffrance et la mort sans fixer de salaire ?
Que devraient-ils penser, Eux, qui s’unissaient dans la douleur et dans leur sang et même dans la tombe pour le triomphe d’une France plus belle ?
Que devraient-ils penser, Eux, qui furent si violents dans l’accomplissement de leur devoir pour sauvegarder l’œuvre entreprise par ceux tombés devant eux ?
Que devraient-ils penser, Eux, qui sont tombés avec au cœur l’espoir que leur sang serait le dernier versé pour que la France et le Monde ne connaissent plus d’aurore sanglante ?
N’oublions jamais que nous sommes les fruits de la moisson qui a germé de ces sillons d’un sang généreusement versé.
100 ans après, nous n’en sommes plus à l’examen de conscience mais lorsqu’on a le courage de parler, Ami, il faut dire la vérité : « Que l’honneur soit rendu à nos enfants de Limoges ». Nous devons être en leur nom les ouvriers laborieux de la Paix. C’est ce que nous dit le serment de Paix de Verdun prononcé le 11 novembre 1936 à Douaumont à l’occasion du rassemblement international des Anciens combattants :
« Parce que ceux qui reposent ici et ailleurs ne sont entrés dans la Paix des morts que pour fonder la Paix des vivants ;
Et parce qu’il nous serait sacrilège d’admettre désormais ce que les morts ont détesté ;
La Paix, que nous devons à leur sacrifice, nous jurons de la sauvegarder et de la vouloir. »
1940 la France défaite est envahie, parce qu’elle n’avait pas su regarder ce qui se passait autour d’elle et se préparer à se défendre.
Rendons hommages à nos soldats et nos forces armées qui au péril de leur vie mènent des combats pour que nous restions libres.
Un soir lorsque j’avais 18 ans, mon grand père Jean me dit, j’ai fait la guerre aux boches de 1914 à 1918, ils nous ont envahi en 1940, mais maintenant nous devons consolider la paix et travailler avec les Allemands pour construire une Europe Forte.
Mesdames et messieurs, je vous remercie."